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Santé

Comment mettre les acouphènes en sourdine.

Le 4 novembre 2018

Suite de nos échos à la journée de visite des laboratoires de l’X avec Robin Guillard, président et cofondateur de Zeta Technologies, une start-up qui développe une solution innovante pour soulager les personnes souffrant d’acouphènes.

– Si vous deviez pitcher, pour commencer, votre start-up et son concept ?

Zeta Technologies a été créée l’an passé, avec l’ambition de soulager les personnes qui souffrent d’acouphènes en s’appuyant pour cela sur des travaux de recherche menés en neurosciences. Publiés en 2005, ils s’étaient efforcés de caractériser les rythmes d’activités cérébrales liées aux acouphènes. La comparaison des résultats obtenus auprès des deux échantillons de populations (avec et sans acouphènes) a mis en évidence des excitations différentes dans les aires auditives du cerveau droit. Forts de ces résultats, des chercheurs ont essayé de voir si, à partir d’un travail de rééducation, on pouvait atténuer ce symptôme que sont les acouphènes. Icono Zeta Tech2018Et c’est effectivement ce qui a été observé en 2007 au travers d’une première étude, confirmée par une seconde, menée quelques années plus tard, en 2011. La solution que nous proposons est inspirée de cette méthode qui se propose de rééduquer le cortex auditif.

– En quoi consiste-t-elle ?

Concrètement, elle peut s’apparenter à une salle de gym pour le cerveau. Nos patients sont équipés d’un casque qui mesure leur activité cérébrale par électroencéphalographie – une technique déjà en usage dans les hôpitaux et totalement non invasive.  L’activité de leurs cortex auditifs s’affiche ainsi en temps réel. En la visualisant, nos patients peuvent apprendre à la contrôler puis à la rééduquer. Nous sommes actuellement en train de mener notre propre étude clinique, pour en vérifier efficacité de notre procédure de rééducation. Sur la trentaine de personnes que compte notre échantillon de volontaires, seize l’ont déjà suivie. Et les résultats sont conformes à ceux des études que j’ai évoquées. Nous avons maintenant l’ambition d’en obtenir de meilleurs.

– Vous avez conscience de susciter un grand espoir chez les personnes, très nombreuses, qui souffrent d’acouphènes…

Absolument. D’autant que cette population continue de croître sous l’effet de nuisances sonores qui vont en augmentant. Nous travaillons d’ailleurs à faire davantage de prévention.

– « Nous », c’est à dire ?

Mes deux associés et moi. Nous avons créé ce projet ensemble pendant notre master 2 d’entrepreneuriat, entre l’École polytechnique et l’Université de Berkeley (en Californie).

– Êtes-vous incubés ?

Oui, à la Fondation de l’audition, à Paris, qui est justement très engagée dans la prévention des risques d’acouphènes…

– A Paris ? Est-ce à dire que l’écosystème Paris-Saclay n’a joué qu’un rôle secondaire dans la genèse de votre start-up ?

Non, au contraire. Ma passion pour les neurosciences est née ici, sur le Plateau de Saclay, suite au tout premier cours qu’avait donné Yves Frégnac, le directeur de l’Unité de neurosciences, information et complexité (Unic) du CNRS, et depuis peu à la retraite. Une personne avec laquelle j’ai beaucoup apprécié d’échanger. Il m’avait d’ailleurs accueilli dans son laboratoire pour me faire rencontrer certains de ses collaborateurs et me guider dans ma découverte de ce domaine passionnant.

– Neurosciences, qui sont particulièrement bien représentées sur le Plateau de Saclay au travers notamment de NeuroSpin, dirigé par Stanislas Dehaene…

Oui, en effet. A défaut d’avoir pu rencontrer ce dernier, j’ai interagi avec plusieurs personnes de son laboratoire et notamment Sid Kouider, qui dirige l’équipe de recherche « Cerveau et conscience », à l’École normale supérieure (ENS) de Paris, et qui s’est aussi lancé dans l’entrepreneuriat innovant. Par ailleurs, comme indiqué, j’ai suivi, ici même, à l’École polytechnique, le master entrepreneuriat dirigé par Bruno Martinaud et qu m’a valu de passer quatre mois à Berkeley. Depuis, Bruno Martinaud est resté notre mentor.

– Et aujourd’hui, quelles sont vos autres attaches à Paris-Saclay ?

L’an passé, nous avons été lauréats du prix Jean-Louis Gerondeau – Zodiac Aerospace, qui, pour mémoire, a pour objet de favoriser la maturation d’un projet émanant d’un élève, doctorant ou diplômé de l’X, et pouvant donner lieu à une création d’entreprise. J’ajoute que c’est par l’intermédiaire de la Fondation qui remet ce prix, que nous avons pu identifier notre premier volontaire – le directeur de Zodiac Aerospace en personne, qui se trouve avoir des acouphènes. Les résultats ont été probants. Nous avons depuis candidaté pour un autre prix, celui de la Fondation Jean-Jacques et Felicia Lopez-Loreta, qui a, elle, pour but d’encourager les étudiants diplômés des Hautes Écoles publiques polytechniques suisses et françaises à mener à bien un projet innovant et hautement prometteur, soit de recherche académique soit à visée entrepreneuriale.

– Qu’est-ce qui vous a prédisposé à vous lancer à votre tour dans l’entrepreneuriat innovant ?

En réponse à cette question, je ne peux m’empêcher de penser à mon grand-père, qui, à la fin de sa carrière professionnelle, avait lancé sa propre start-up ! Il a aujourd’hui 84 ans et continue à bosser pour gérer sa boite. Quelque chose dont je suis très fier et qui a dû très certainement m’influencer dans mon choix de m’orienter vers l’entrepreneuriat innovant.

 A lire aussi…

… le récit de notre visite de laboratoires de l’X (pour y accéder, cliquer ici).

… les entretiens avec Gérard Mourou, prix Nobel de physique 2018 (mise en ligne à venir) et Raphaël Tomasi, en phase d’idéation d’un projet de start-up, visant à améliorer les tests sur cellules, réalisés en laboratoire (cliquer ici).

Crédit photo : Jérémy Barande / École polytechnique.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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