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Entrepreneuriat innovant

Quand l’Usine du futur s’invite à Nano-INNOV.

Le 23 février 2016

Suite de notre écho à la matinée organisée par le Pôle de compétitivité mondial Systematic Paris-Région, le jeudi 11 février dernier, sur le thème de l’Usine du futur, à travers l’entretien que nous accordé Christian Balle, le président du Groupe Thématique dédié à cet enjeu.

Pour accéder au compte rendu de cette matinée, cliquer ici.

– L’enjeu de cette matinée, si vous deviez l’expliquer au grand public ?

Il s’agissait, autour de la thématique de l’Usine du futur, de réunir différents acteurs, que ce soit des laboratoires de recherche, de grands groupes et surtout des PME pour monter des projets d’innovation collaborative en vue d’un prochain appel à projets. Ce matin, pas moins d’une dizaine de ces acteurs, y compris des cabinets de consultant, venus de toute l’Ile-de France (rappelons que le Pôle de compétitivité Systematic Paris-Region, créé en 2005, se déploie à l’échelle de la Région capitale), mais aussi du reste de la France sont venus présenter leurs compétences dans des domaines aussi divers que les big data, les logiciels, la robotique, la cybersécurité, etc.

– De nombreux acteurs, effectivement, mais avec des absents remarqués : je pense aux logisticiens, en particulier. Or, n’ont-ils pas eux aussi des compétences à apporter dans la conception de l’Usine du futur ?

Par Usine du futur, il ne faut pas penser seulement au bâtiment dans son enceinte, avec ses lignes de production. Mais entendre l’ensemble des activités réalisées aussi bien sur un site qu’en interaction avec l’extérieur. La logistique en fait donc bien évidemment partie, de même que tout ce qui touche aux fournisseurs ou encore aux clients finaux.

– Mais ainsi envisagée, cette Usine du futur n’est-elle pas déjà-là ?

Oui et heureusement ! Autant le dire : il n’y aura pas de big bang de l’Usine du futur. Tout ne se fera pas en même temps, mais pas à pas, de manière itérative. Et au travers de différents métiers, aussi : la logistique, donc, mais aussi la robotique, les logiciels,… Autrement dit, il y a aura plusieurs expérimentations et tentatives avant que tout cela se connecte et s’incarne dans une nouvelle forme d’usine. On en revient à ce qui m’apparaît d’ailleurs l’enjeu de cette Usine du futur : en connecter les différentes composantes aussi bien en interne qu’en externe.

– A terme, n’est-ce pas la notion même d’usine qui risque d’être remise en question ? Qu’est-ce qui empêche de penser à des unités interconnectées, mais éparpillées ?

De fait, c’est une tendance appelée à se renforcer, a fortiori avec le passage de la production de biens manufacturiers à la production de services. A l’heure de ce qu’il est convenu d’appeler l’additive manufacturing, lié à l’impression 3D, on peut très bien imaginer que les enceintes de production ne soient plus concentrées au même endroit. Cela étant dit, il y aura toujours du personnel, des robots et des pièces à fabriquer et à assembler. Il faudra donc bien des lieux tangibles. Ne serait-ce que pour optimiser les investissements en équipements lourds dont on aura encore besoin. Si, donc, on peut imaginer une séparation de fonctions en différents sites interconnectés, pour autant, on ne basculera pas dans le tout virtuel. Certes, on parle de plus en plus de réseaux d’usines ou d’ateliers, mais il y a toujours des bâtiments à concevoir et à construire. Etant entendu que leur taille peut varier. Gardons à l’esprit qu’en France une usine, c’est en moyenne 70-80 personnes. Les grandes usines de production dont les effectifs s’élèvent à plusieurs milliers de personnes sont l’exception. La grande masse des autres usines sont de taille relativement petite. C’est elles qu’on pourrait envisager de mieux interconnecter. Seulement, intégrer de nouvelles technologies liées au numérique dans des usines de petite taille, c’est compliqué. D’abord, on se heurte à un frein d’ordre culturel tant du côté du personnel que des dirigeants. Ensuite, il faut bien cerner l’apport d’une telle intégration qui ne saurait être une fin en soi. C’est plus facile à faire dans une grande usine où les investissements peuvent être amortis rapidement. Sans doute cela engage-t-il une réflexion sur la manière de mutualiser les besoins. Ce n’est pas forcément une petite usine qui pourra investir seule dans son coin. D’où l’intérêt des plateformes coopératives qui ont été présentées, comme celle portée par CentraleSupélec pour tester l’intégration de nouvelles technologies dans des lignes de production classiques, soit le projet ICO. Elles permettent de réunir plusieurs industriels qui ont des besoins plus ou moins analogues.

– Encore un mot sur cette plateforme, qui illustre au passage que Paris-Saclay peut effectivement s’imposer comme un acteur de poids dans la conception de l’Usine du futur.

En effet. Et si en plus de rendre attractive la thématique de l’Usine du futur, elle peut contribuer à l’attractivité du Plateau de Saclay, je dis tant mieux. Charge à nous de bien communiquer à son sujet.

– Avez-vous le sentiment que la problématique de l’Usine du futur commence à prendre ?

Force est de constater que les personnes qui assistent à des événements autour de l’Usine du futur donnent l’impression d’être plongées dans l’inconnu. Elles ont entendu parler de cette thématique, mais sans toujours savoir de quoi il retourne exactement. D’où l’importance de conférences plénières comme celle que nous avons proposée ce matin. C’est l’occasion de connecter les compétences dont on a besoin, mais aussi de montrer ce qui se fait déjà. C’est aussi pour cela que j’ai insisté pour que la prochaine plénière croise plusieurs pôles de compétitivité car, bien évidemment, l’Usine du futur touche à plusieurs problématiques.

– Au cours de cette même matinée, vous en avez aussi appelé à un élargissement aux représentants des sciences sociales et humaines…

Oui, les ingénieurs, moi le premier, ont pu penser que l’Usine du futur était d’abord un problème d’ingénieurs. Or, dans l’Usine du futur, il n’y a pas que des technos, il y a aussi des hommes et des femmes avec tout ce que cela implique en termes d’acception des nouvelles organisations du travail, des interfaces Homme/Machine, etc. Il ne suffit pas de concevoir des technos qui répondent à des problèmes, il faut encore qu’elles soient appropriables. C’est dire si, effectivement, les chercheurs en sciences sociales et humaines ont des choses à nous dire. Force est de constater leur absence dans les réponses aux appels à projets. Sans doute cela tient-il à la formulation même de ces appels qui mettent trop l’accent sur les seuls enjeux technologiques. Au Pôle Systematic, et en tout cas dans notre Groupe thématique, nous comptons suppléer à cette situation en ne manquant pas de questionner davantage les acteurs qui participent aux projets sur la manière dont ils envisagent de prendre en compte la dimension humaine de l’Usine du futur.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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