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Comment communiquer sur sa dimension internationale. L’exemple de l’X (suite)

Le 3 décembre 2015

Suite de notre entretien avec Claire Lenz, responsable de la communication internationale de l’École polytechnique, qui revient ici, outre les classements internationaux, sur l’intérêt d’une mutualisation des efforts entre les établissements membres de l’Université Paris-Saclay, n’excluant pas la préservation de la singularité de chacun.

 Pour accéder à la première partie de l’entretien avec Claire Lenz, cliquer ici.

– Avez-vous le sentiment de disposer des moyens de votre politique ?

Oui, car nous ne partons pas de rien. Nous nous appuyons sur des choses qui se faisaient déjà de longue date, mais sans bénéficier toujours d’échos. Je pense en particulier aux déplacements que l’équipe dirigeante est amenée à faire à l’étranger. Jusqu’à présent, ils étaient peu valorisés. Notre ambition est d’en faire autant d’opportunités pour faire parler de l’X et de son écosystème, en organisant notamment des réunions presse. L’X signe régulièrement des accords. Pourquoi ne pas en faire écho ? Cela contribue à asseoir l’image d’une École internationale.
En avril dernier, par exemple, Jacques Biot a fait partie de la délégation qui a accompagné le Président de la République, à l’Ecole Polytechnique Fédérale de Lausanne (EPFL). Etait prévue au programme une visite de celle-ci. Nous avons saisi cette opportunité pour signer un accord bilatéral, en présence du Président de la République et de la Présidente de la Confédération suisse.

– Est-ce une manière de prendre acte du fait qu’on est désormais dans un monde en évolution, où il faut faire l’effort de se faire connaître quand bien même on s’appelle l’École polytechnique ?

Il est clair que si la richesse de l’X n’est pas à démontrer, en revanche, elle gagne à être mieux connue. Force est de reconnaître que la vision qu’on en a ne correspond plus toujours à la réalité. Y compris parmi d’anciens X ! Or, ces derniers font partie de nos meilleurs ambassadeurs. Tous ont apprécié leur séjour dans cette école, en connaissent les valeurs. Mais ils ne sont plus forcément au fait de son actualité et de ses évolutions, notamment en matière d’innovation et d’entrepreneuriat, ou encore de son nouvel écosystème. Difficile de savoir ce que cela recouvre pour un ancien qui est installé en Californie depuis plusieurs années. Les Alumni sont donc aussi une « cible » de notre communication à l’international. Il s’agit de les convaincre de l’intérêt de garder contact avec nous, de se tenir informés car l’école est plus que jamais en évolution.

– Cible, dites-vous ? En avez-vous d’autres ?

Oui, bien sûr. Au-delà des Alumni, je pense à tout ce réseau d’alliés que sont nos partenaires académiques, mais aussi le réseau diplomatique y compris les alliances françaises. Il importe d’avoir le réflexe de s’appuyer sur eux quand on se déplace à l’étranger. De les informer aussi. Car on peut être attaché de coopération scientifique et universitaire mais ne pas savoir que l’X est bien plus qu’une grande école, un élément moteur de tout un écosystème.
Autre cible que nous souhaitons privilégier : les entreprises françaises implantées à l’étranger, mais aussi les entreprises étrangères installées en France. Elles sont autant de débouchés possibles pour nos élèves. Mais cela suppose que leurs DRH en sachent autant que possible sur l’École et son environnement porteur, en faisant bien la distinction avec les autres établissements arborant le nom de polytechnique. Cette appellation est en effet utilisée partout dans le monde selon des acceptions diverses et par des établissements d’inégale qualité. Il importe donc de faire connaître ce que polytechnique veut dire au sens de l’X.

– Dans quelle mesure ce besoin de renforcer la communication à l’international est-il lié à une dynamique propre à l’X ou au contexte de Paris-Saclay ?

Il est lié aux deux ! Au sein de Paris-Saclay, l’École polytechnique conserve une identité spécifique qui demande à être explicitée à l’étranger. En ce sens, il y a donc un enjeu propre à l’X : expliquer notre modèle, nos exigences, faire valoir le parcours de nos Alumni, la qualité de notre recherche. Mais une fois que j’ai dit cela, il est clair que cela n’a de sens qu’en lien avec l’écosystème de Paris-Saclay dans lequel s’insère désormais l’X. L’ambition internationale de ce dernier nous incite à renforcer notre communication sur notre propre dimension internationale.

– Comptez-vous mutualiser vos efforts avec d’autres membres de Paris-Saclay ?

Oui, bien sûr. C’est déjà le cas avec l’ENSTA ParisTech avec laquelle nous avons des liens anciens (c’est une école d’application de l’X), qui n’ont d’ailleurs cessé d’être renforcés depuis que cette école s’est installée à nos portes en 2012. En juin dernier, Yves Demay, le Directeur général de l’X, et Elisabeth Crépon, la Directrice de l’ENSTA ParisTech, se sont rendus ensemble en Ukraine, à l’occasion d’un forum franco-ukrainien de l’enseignement supérieur et de la recherche. Ce déplacement a été l’occasion de signer un accord commun à l’Institut polytechnique de Kiev, avec lequel nous collaborions déjà pour notre part. Cet accord vise notamment à renforcer le programme d’échange d’étudiants et les collaborations en matière de recherche et d’innovation (cette université ukrainienne dispose d’un parc dédié). Un communiqué de presse commun a été publié à cette occasion. Voilà un exemple parmi d’autres de communication commune à l’international avec un autre établissement de Paris-Saclay, qui profite à chacun, sans lui faire perdre sa singularité.
Si un tel partenariat avec l’ENSTA ParisTech a pu se mettre en place aussi rapidement, c’est bien sûr parce que nos équipes se connaissent déjà. Pour mémoire, Elisabeth Crépon a été par le passé en charge des relations internationales de l’X. Nul doute cependant que ce genre d’initiative est appelé à se répandre. Des établissements de Paris-Saclay interviennent dans les mêmes pays que nous. Nous réfléchissons donc aux perspectives de développement de relations conjointes.

– Dans quelle mesure le classement de Shanghai a été un aiguillon ?

Si vous le voulez bien, je ne répondrai pas sur ce classement en particulier, mais à propos de l’ensemble des classements internationaux qui ont eu tendance à se multiplier ces dernières années. De prime abord, ce sont des baromètres intéressants, qui permettent de savoir comment notre école se situe par rapport à d’autres, comment elle est perçue, quels en sont les forces et les éventuels points à améliorer.
Après, chaque classement a ses critères méthodologiques. Ce qui explique que l’école performe plus que dans d’autres. Typiquement, le classement de Shanghai prend en compte des effets de taille, ce qui dessert probablement les grandes écoles à la française comme Polytechnique. Celles-ci n’en exercent pas moins une forte attraction auprès des universités chinoises à commencer par celle de Shanghai JiaoTong, à l’origine dudit classement. Quand celle-ci a voulu créer une école d’ingénieur, c’est vers nous et trois autres écoles d’ingénieurs françaises – Mines ParisTech, ENSTA ParisTech et Télécom ParisTech – qu’elle s’est tournée. Cette école a vu le jour et s’appelle Shanghai JiaoTong ParisTech ; elle propose une formation en six ans dont deux années de classe préparatoire. A l’issue de celles-ci, ses élèves peuvent ou bien rester dans cette école ou bien accéder à l’une des quatre écoles partenaires françaises sur concours. Il se trouve que, cette année, nous accueillons justement cinq Chinois issus de ce parcours.

– Il n’y a cependant aucun espoir que cela influe sur le classement de Shanghai…

(Sourire) Malheureusement non ! Le paradoxe n’en reste pas moins rassurant : l’École polytechnique a beau ne pas figurer dans le palmarès de tête du classement, elle n’en reste pas moins reconnue et appréciée dans le monde, et en Chine en particulier.
Encore une fois, ne nous focalisons pas sur le classement de Shanghai. D’autres classements montrent les forces de Polytechnique. Je pense en particulier au classement Alma Mater du Times Higher Education, qui s’intéresse aux universités d’origine des PDG d’entreprises du Fortune 500 : l’École polytechnique arrive en 4e position au plan mondial, au 1er rang en Europe. Pour information, HEC arrive 5e. En imaginant que les deux écoles soient groupées, elles arriveraient en 2e position, après Harvard et devant Stanford. Nous sommes également bien placés dans d’autres classements du Times Higher Education, par exemple celui qui concerne l’international justement : l’École polytechnique arrive au 5e rang mondial avec, notamment, un pourcentage élevé de publications en collaboration avec des universités étrangères (plus de 60%). D’après le classement de Leiden, qui évalue les publications de recherche, l’École polytechnique arrive au 66e rang mondial et elle est 1re en France.
C’est en croisant ces différents classements que l’on peut se faire une idée plus juste du positionnement de l’École, au plan mondial. En dehors de ces classement, on peut invoquer un indicateur plus subjectif et néanmoins significatif : la facilité avec laquelle les Polytechniciens qui candidatent pour intégrer les meilleures universités étrangères sont accueillis : ils le sont à bras ouverts !

– Au fait, que faisiez-vous à Chicago, avant de rejoindre l’X ?

J’avais suivi mon mari, qui, chercheur, avait décroché un poste à l’université de Chicago. J’ai mis à profit ce séjour de deux ans et demi pour travailler pour cette dernière. Puis nous sommes rentrés en France, moi pour rejoindre l’X, donc, lui pour intégrer Paris-Sud, comme chercheur. C’est dire si nous sommes un couple très Paris-Saclay !

En illustration de cet article : Elisabeth Crépon et Yves Demay (à droite) lors du Forum Franco-Ukrainien. En Une, grand format : le colloque sur l’innovation et l’entrepreneuriat organisé par le groupe X-Maroc.

Sylvain Allemand
Sylvain Allemand

Journaliste

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